-
Conseillé par Yv7 octobre 2019
Court texte de Maylis de Kerangal sur la cuisine, à travers le parcours d'un jeune homme qui ne s'y destinait pas particulièrement. Elle s'empare de son sujet et nous voilà véritablement avec Mauro dans les cuisines. Le vocabulaire est soigneusement choisi mais point trop technique. Il sait dire à merveille la beauté et la difficulté de ce travail. Les coups de stress lorsque Mauro veut faire bien et bon avec des produits sains et de qualité, les semaines de 70 heures pour un salaire pas vraiment en adéquation, la fatigue, les plats à inventer en fonction des arrivages du jour, mais aussi la satisfaction des clients qui reviennent, qui conseillent, qui félicitent.
Mi-roman mi-documentaire, c'est la collection initiale au Seuil : Raconter la vie, qui veut cela, mais c'est aussi un genre dans lequel l'auteure excelle. Son style est toujours élégant, soigné, de belles phrases, parfois longues, qui donnent le rythme, qui sait prendre le temps, contrairement à un cuisinier en plein rush. Bref, ce livre donne envie de fréquenter les bons restaurants, pas forcément les chers, mais ceux qui travaillent des produits frais, pour se faire plaisir et encourager et remercier tous les Mauro.
"Mauro passe l'examen en candidat libre un an plus tard. Ce jour-là, il revêt la tenue de cuisine qu'il doit porter pour les épreuves, une tenue achetée chez Monsieur Veste pour 68 euros et qu'il choisit blanche : pantalon et veste de cuisine, mocassins spéciaux, tablier demi-chef (longueur aux genoux), calot - il défile à travers le petit jardin, silencieux, le torse étroit moulé dans le tablier, ses longs bras fins, puis me regarde, dubitatif : ça va ? j'ai l'air d'un clown ou pas ? Je souris, il n'est pas mal du tout et totalement crédible." (p. 56/57)